Loretta Banana

années 20

Dans ma bibliothèque#6 : Roaring 20’s et babydolls sous amphetamines

« Reading gives us somewhere to go when we have to stay where we are. » (Lire nous donne quelque part où aller quand nous avons à rester là où nous sommes)

Pour ce tout nouveau volet dans ma bibliothèque, je vous emmène dans ma machine à remonter le temps, tout d’abord dans le Paris qui swingue des 20’s puis de l’autre côté de l’atlantique, durant les années 50, dans le terrible monde du showbusiness ! En voiture, Simone !

Claude Izner – Le Pas Du Renard (Editions 10-18)


Voilà 1 an que cette couverture revenait sans cesse dans mes suggestions d’achats de bouquins (car même si je privilégie ma très belle et grande librairie indépendante, il m’arrive de céder, dans la précipitation, aux sirènes d’Amazon…). Puis un jour, au hasard de mes déambulations en boutique, je tombe à nouveau sur cette couverture. Je cherche justement de quoi combler ma soif de lecture, alors il m’en faut peu pour me décider !

Je l’embarque et le lis très rapidement, tant j’ai été happée par ce décor si fidèle au Paris des années 20 qui danse le fox-trot et s’encanaille dans les cabarets pour oublier la misère de la fin de la guerre. On y suit les aventures d’un jeune pianiste talentueux, Jeremy Nelson, tout droit débarqué des Etats-Unis et qui rejoint la pas si joyeuse troupe du Mi-Ka-Do, un music-hall de Belleville.

Malheureusement pour le protagoniste (mais heureusement pour nous joyeux lecteurs avides d’histoires romanesques), les choses vont vite se gâter pour l’Américain qui, au gré de ses rencontres et de sa vie Parisienne, va assister malgré lui à de mystérieuses disparitions, et le propulser dans un rouage infernal mettant sa propre vie en danger !

Ainsi donc, en plus d’être un roman historique, Le Pas du Renard est surtout une enquête parfois dure à démêler, car les protagonistes sont nombreux et il vaut mieux ne pas se laisser déconcentrer pendant sa lecture, au risque d’être totalement perdu comme je l’ai été parfois dans l’énigme ! C’en est donc parfois un peu déroutant, et on est bien content, je l’admets, d’arriver aux dernières pages pour comprendre véritablement le sens de toute cette mascarade.

Néanmoins c’est un roman que j’ai adoré lire, ne serait-ce que pour le talent d’écriture indiscutable des auteurs, deux soeurs qui utilisent le pseudonyme de Claude Izner pour signer leurs ouvrages. Si comme moi vous êtes très attaché.e.s aux vieilles expressions désuètes de Français, alors ce livre va vous régaler. J’ai ainsi pu ajouter de nombreuses expressions à mon vocabulaire (comme “charrier dans les bégonias“), ce qui fait souvent rire mon entourage et que ma mamie aurait certainement adoré. En somme, même la rédaction du livre reste fidèle à l’époque et cela relève à mon sens d’un sacré tournemain ! Bref, il me tarde de lire la suite, “La femme au serpent“.

A lire si… vous aimez bien sûr les Roaring Twenties, et surtout Paris, que vous êtes un fan de Cluedo ou d’Agatha Christie, et surtout que vous n’êtes pas effrayé.e.s par les tournures de phrases vieillotes et parfois un peu alambiquées (synonyme de charme pour ma part).


Jacqueline Susan – La Vallée des Poupées

Des années que je lorgnais sur ce titre sans pour autant jamais me le procurer. Il faut dire que La Vallée des Poupées a fait parler d’elle, ne serait-ce que par son adaptation cinématographie avec la superbe et regrettée Sharon Tate. Et chose suffisamment amusante pour que je le précise, ma délicieuse amie Yasmine me l’a justement offert en cadeau d’anniversaire, alors même que je venais de le lire ! Autant dire que cette jeune demoiselle me connait fort bien !

Je trouve d’ailleurs cette anecdote extrêmement touchante car même si La Vallée des Poupées parle avant tout du monde scintillant du show business (mais qui s’oxyde aussi vite qu’il vous engloutit), il parle aussi d’amitié entre trois femmes. Et autant vous le dire tout de go : si le roman commence au firmament de la vie de ces trois sublimes protagonistes, douées, belles comme le jour ou intelligentes (et parfois tout cela à la fois), les choses vont vite se gâter à mesure que leur réussite sociale les élève.

Critique glaçante du miroir aux alouettes qu’est le succès dans le monde du spectacle, du divertissement et de la publicité, c’est aussi une époque qui est dépeinte, celle des années 50, et la condition des femmes qui y est évoquée. Car oui, les femmes, ou les “poupées” que l’on observe avec fascination sur la couverture sont au centre du roman, mais elles se partagent la vedette avec d’autres sortes de poupées : une ribambelle de pilules, de la plus anodine à la plus dévastatrice, et elles précipiteront la chute de nos trois nymphes à succès.

En somme, j’ai adoré et dévoré ce bouquin, et en suis devenue accro le temps de ma lecture (à croire que les poupées ont fait aussi leur effet par l’écriture). Pour autant, j’en suis ressortie exténuée, fatiguée et profondément blessée (au point de laisser couler quelques larmes), tant le destin de ces trois femmes est dur à avaler – comme finissent par l’être leurs pilules. Mais je ne veux en rien vous gâcher l’histoire, tout ce que je peux vous dire c’est que ce livre est iconique, qu’il a été jugé subversif lors de sa sortie en 1966, et je peux dire que je comprends pourquoi !

A lire si… Honnêtement, vous n’avez aucune bonne raison de vous dispenser de ce livre ! D’autant que sa lecture est facilement transposable à notre époque, à cette course intenable et infernale à la célébrité sur les réseaux sociaux et à la (trop grande, à mon goût) divulgation des drogues et psychotropes. Je connais bien trop de personnes qui ont cédé aux tentations des paradis artificiels (et je ne les juge pas, mais quel gâchis malgré tout !), et que vous en fassiez partie ou pas, cette lecture provoquera sûrement quelque chose en vous !

 

L’expo Objets Précieux Art Deco de la collection du Prince Sadruddin Aga Khan

Imaginez-vous en pleine période des “Roaring Twenties”, les Années Folles*. Les femmes, apprêtées et élégantes, sont désormais prêtes à embrasser leur liberté nouvellement acquise, conséquence de la fin de la première guerre. Elles sortent, vivent leur vie en baladant une féminité exacerbée, symbole de cette époque. Ces beautés aux cheveux courts, et aux robes qui le deviennent tout autant, se raccourcissant à mesure que leur verres se remplissent tandis que leurs cigarettes se consument, ont désormais le droit de fumer, de se maquiller et de boire en public.

Pour accompagner ces nouveaux gestes de séduction propres à cette époque de “Jazz Age” et de soirées endiablées, ces femmes libres exposent leurs précieux objets tels que des minaudières, étuis à cigarettes, poudriers et autres objets en or, complices de leur charme. C’est dans ce contexte qu’est présentée la sublime collection des Objets Précieux Art Deco de la collection exceptionnelle du Prince et de la Princesse Sadruddin Aga Khan.

Nécessaire Cyprès, 1928 – Van Cleef & Arpels
Nécessaire Putti, Paris, 1920 – Cartier

 

J’ai depuis toujours été fascinée par tous ces objets de beauté précieux, tant par leur contenu que leur contenant, et tout ce que cela évoque, qu’il m’était impossible de rater cette très brève exposition (elle se tient du 4 au 25 avril 2018, il vous reste donc quelques jours pour vous y précipiter !). C’est d’ailleurs la première fois qu’elle est présentée en France, et ce dans un écrin de choix, puisqu’elle est exposée à l’école des Arts Joailliers*, 31 rue Danielle Casanova, à 2 pas du métro Opéra.

Vanity Case et étui à cigarettes. Cartier, Paris. Vers 1920

On y déambule au gré de vitrines scintillantes qui exposent donc des trésors d’orfèvrerie, travaillés dans de l’or ou des métaux précieux, souvent sertis de diamants, parfois ornés de nacre, de laque ou d’émail translucide. Les pièces y sont répertoriées par style, tous propres à l’époque : on y découvre de multiples influences, qu’elles soient japonaises ou chinoises (avec des saynètes ou des paysages qui ornent des étuis à cigarettes par exemple) ou bien encore Perses, sans oublier bien sûr le courant Art Déco, qui reste mon préféré.

Etui à cigarettes motif “aubergine”, Paris, 1927 – Van Cleef & Arpels (offert en cadeau d’anniversaire de mariage du Prince Sadruddin à la Princesse Catherine)

 

Nécessaire, Paris, 1925 – Strauss Allard et Meyer

Cette exposition est très rapidement visitée (donc vous n’avez aucune excuse pour la rater !), gratuite et l’école offre même un très dense catalogue reprenant en détail chaque pièce exposée, une véritable mine d’or !

Vous me direz ce que vous en avez pensé si vous l’avez visitée ? En attendant je vais aller jouer au loto pour espérer pouvoir m’offrir un jour une pièce d’histoire si précieuse 

“Objets précieux Art Déco” – Ecole des Arts Joailliers
Du 4 au 25 avril 2018
31, rue Danielle Casanova, Paris 2e (métro Opéra/Tuileries)

*Voici une petite playlist pour vous immerger dans l’époque ! 

**J’ai beau avoir travaillé près de 6 ans dans l’univers de la bijouterie-joaillerie et tout ce qui scintille, j’étais absolument profane sur l’existence de l’école des Arts Joailliers à Paris, soutenue par Van Cleef & Arpels. En quelques mots, cette école accueille toutes les personnes passionnées par l’univers du bijou et qui souhaitent percer les secrets du monde de la joaillerie. Pour en savoir davantage, c’est ici