Loretta Banana

femme

L’invité indésirable, ou comment je lutte contre mon PMS

[Cet article a été écrit sous l’influence dudit PMS]
Aujourd’hui je voudrais vous parler d’un sujet qui a été maintes fois évoqué, mais qui concerne tout de même une très grande partie de l’humanité. Un sujet qui peut rendre encore et malheureusement parfois honteuse (car il s’agit d’un sujet féminin, et vous me voyez donc venir…), déprimée, énervée, anéantie, qui cause des douleurs corporelles parfois intenses pour certaines, des “mini” dépressions pour d’autres, et parfois rien de tout cela. En somme, je voulais vous parler de cycle féminin, de menstruations, et de tout ce qui régit notre utérus une fois par mois.

Alors je vous avertis illico : je ne vais pas réinventer la roue ici, hein, qu’on soit bien clair. Je ne compte pas vous parler des endroits du globe qui excluent les femmes lorsqu’elles ont leurs règles parce qu’on les estime impures (même si j’en aurais bien envie, mais ce n’est pas le sujet), ni même de la taxe rose (ou “women tax“) pour parler du budget CONSIDERABLE que les femmes doivent consacrer à cet impératif naturel qui est le leur. Non, ma simple prétention ici est de partager avec vous quelques conseils qui m’ont été donnés, mon expérience et tout ce que j’ai mis en place pour rendre ces quelques jours un peu plus doux. J’ai donc scindé le sujet en deux articles distincts : le PMS puis les règles. Voici donc le premier volet.

LE SYNDROME PRE-MENSTRUEL (OU PMS/SPM)
Tout d’abord, mesdames messieurs, j’aimerais vous parler de cet individu qui tape l’incruste alors qu’on ne l’a pas sonné – un peu comme ce pote de votre mec qui se pointe à l’improviste, toujours les mains vides, et déballe des réflexions machistes devant vous -, j’ai nommé : le PMS (ou “SPM” pour Syndrome Pré-Menstruel, en français).

Ahhhh le PMS, rien que son nom donne l’impression de parler d’une maladie vénérienne, et dieu sait que ce pourrait être le cas, tellement il emplit de rage à chaque instant de sa visite. Pour celles mais surtout ceux qui ignoreraient de quoi il s’agit, c’est le terme utilisé pour parler du syndrome prémenstruel, parfois encore relégué dans les livres de contes et légendes, alors que je constate que bon nombre de femmes (pour ne pas dire toutes) en sont victimes autour de moi. Il apparait principalement AVANT les règles (mais, spoiler alert : il peut aussi débouler APRES, j’ai fait sa connaissance il y a peu, même mon gynéco ignorait que ça existait !), et pour ainsi dire, il peut pourrir littéralement la vie de sa victime de 1 à 2 jours avant les règles et jusqu’à parfois 15 jours (juste après l’ovulation). En grande veinarde que je suis, le mien correspond PILE à ce second scénario. Livin’ la vida loca m’a dit un jour Ricky Martin.

Lorsque je le ressens, c’est un peu comme si j’étais un gremlins et qu’on m’avait déversé un seau d’eau sur le museau et donné à manger après minuit (si vous n’avez pas la référence, je ne puis rien pour votre âme) : je ne contrôle plus rien et mes émotions partent à vaux l’eau. Mes sentiments se décuplent (et quand je dis “se décuplent” je pèse mes mots : je peux vider tout mon liquide lacrymal juste parce que mon chat a déversé sa litière sur le carrelage). Ou alors, avoir des envies meurtrières de type mettre le coeur de mes victimes dans mes piluliers vintage, un peu comme la méchante reine dans Blanche-Neige (mais promis, je ne suis jamais allée jusque là car mon âme est pure, le reste du temps – ou presque).

Si vous vous reconnaissez là-dedans, alors déjà, vous avez toute mon amitié sincère et mon soutien, car BORDEL, pardonnez mon langage peu châtié, mais ces émotions envahissantes peuvent vraiment finir par peser sur le moral et le physique, voire même causer de sévères états dépressifs récurrents (et ceci a un nom : le trouble dysphorique prémenstruel). Pour ma part, son intensité peut varier d’un mois à l’autre, mais il m’est déjà arrivé de me sentir profondément triste, de perdre tout intérêt pour les choses que j’aime et d’être plongée dans une lassitude voire un dégoût de moi-même (pour ne citer que cela). Il n’est pas rare aussi que je me sente rapidement débordée dans les tâches que j’ai à effectuer, que je sois dénuée de toute motivation, que je traîne des escarpins, en somme. En d’autres termes, ces jours me donnent le sentiment d’être la dernière des imbéciles, que le Jiminy Cricket qui habituellement me donne des conseils si bienveillants sur mon épaule, s’était métamorphosé en Hannibal Lecter miniature, à me susurrer plus de méchancetés et d’inepties qu’en contient un épisode des Anges de la téléréalité.

Et puis comme si ça n’était pas suffisant, ce charmant symptôme s’accompagne parfois et indistinctement selon les femmes, d’autres troubles tels que la poitrine douloureuse, les jambes lourdes, des troubles de l’attention, des bouffées de chaleur, une fatigue intense chronique… La liste est longue et totalement imprévisible selon chacune d’entre nous et sensible à variations d’un mois sur l’autre. (Je tiens aussi à préciser, que certaines femmes ne le ressentent jamais, ou très peu. Il semblerait qu’il soit plus virulent à mesure que l’âge avance – ce qui s’est confirmé sur moi – et il peut aussi être en veille si par exemple, vous prenez la pilule…)

Toutefois, bien qu’il n’y ait malheureusement pas de recettes miracles (sinon ça se saurait), il existe quelques petites astuces, dont certaines que j’ai mises en place, pour combattre ce fichu syndrome indésirable. Je ne me prétends pas médecin ni naturopathe ou quoi que ce soit d’autre, ces conseils sont les miens, mais ils fonctionnent plutôt bien pour limiter la casse mais il convient surtout de les moduler à votre convenance et surtout selon votre corps et vos dispositions.

Les compléments alimentaires (gélules d’onagre, magnésium, vitamines…) :
ça n’a l’air de rien dit comme cela, mais si votre corps est en manque de magnésium par exemple, les symptômes n’en seront que plus virulents. Le magnésium ne doit pas être consommé en continu et de manière excessive, mais procéder à une cure ponctuelle, en fonction de vos symptômes et de la carence que vous ressentez peut s’avérer très bénéfique. Cela a été mon cas, et je remercie d’ailleurs ma camarade de plumes, Amélia Lobbé, psychologue de son état, qui me l’avait conseillé. Vous pouvez d’ailleurs lire ses astuces (très détaillées) sur le sujet sur son blog ici.

Outre donc le magnésium, je complète aussi souvent avec des mélanges de vitamines qui boostent mes défenses immunitaires (car lorsque je tombe malade, c’est toujours à ce moment-là…) et m’aident à garder le cap.

Depuis plus d’un an, j’utilise aussi un complément naturel qui a “révolutionné” mon cycle. C’est mon amie Yasmine qui m’en avait parlé, et si j’étais dubitative au départ, je n’ai pu qu’admettre son efficacité sur le long terme : les gélules d’onagre. Là, l’effet se ressent plutôt (voire même carrément pour ma part) pendant les menstruations (qui me sont habituellement extrêmement douloureuses, il peut même m’arriver de vomir ou d’être alitée le premier ou le deuxième jour). Il convient, pour un maximum d’efficacité, d’en prendre 3 par jour pendant les 10 jours précédents les règles et c’est grâce à celles-ci que mes cycles deviennent plus acceptables. Mais il suffit que je les prenne mal ou pas suffisamment pour que mon cycle, devenu presqu’un long fleuve tranquille, ne se transforme à nouveau en redoutable fleuve du Styx !


Le sport
J’ai bien conscience qu’en phase de PMS voire même de règles, l’envie de bouger se situe au niveau zéro de la motivation. Parce que tout ce cycle provoque fatigue et irritabilité, mais aussi parce que j’ai bien souvent le moral au fin fond de mon porte-jarretelle, j’ai plutôt tendance à regarder Mad Men en boule sous un plaid plutôt qu’à aller suer ce qu’il me reste d’énergie dans une salle retapissée par la transpiration d’autrui. Pourtant… je remarque que lorsque je me fais violence pour aller au sport, la combinaison d’endorphines et d’effort physique me procure un sentiment de bien-être (comme ça l’a été ce mois-ci) et m’aide à évacuer mes tensions, mon irritabilité et à passer ces quelques jours sans trop de heurts. Et lorsque mes règles sont imminentes, une séance de sport (cardio j’entends – ça n’a jamais marché en danse, yoga ou autre) permet de les déclencher – en tout cas en ce qui me concerne – et ainsi d’en finir avec le PMS ! (Je ne sais pas vous, mais cette période de latence a le don de profondément m’agacer, alors je préfère souvent en finir une fois pour toutes !)


L’alimentation
Qui dit PMS ou règles, dit envie de gras, de chocolats, de sucres et nourriture pas forcément super saine (en tout cas pour moi). Pourtant, limiter ces aliments au profit de fruits, légumes et bien s’hydrater permet de préparer le corps au cycle et de le garder alerte tout en lui évitant en plus de devoir se débarrasser des graisses saturées et autres protéines animales qui ne sont pas toujours bien assimilées et qui lui demandent un travail supplémentaire (en plus du cycle menstruel).

Je ne vous garantie pas que je m’y tiens à la lettre à chaque fois, mais j’essaie autant que possible, en favorisant des fruits et légumes que j’aime, en particulier pour mes fringales. Je choisis donc des fruits gorgés de vitamines et qui me procurent du plaisir lorsque je les consomme : kiwis, clémentines, bananes… Si vous le pouvez, privilégiez donc une alimentation à dominante végane (à condition de manger équilibré) car beaucoup plus facile pour le corps à éliminer ce qui lui permet d’être dédié uniquement au cycle des menstruations.


Enfin, mon dernier conseil est d’évacuer.
Non, pas d’évacuer les résidents de votre immeuble ou de votre travail lors de votre SPM, même si j’ose imaginer que la fumée qui s’échappe de vos narines à la moindre contrariété en mode dragon de la belle au bois dormant a dû en faire palpiter plus d’un.e (je parle en toute connaissance de cause). Pourtant, je trouve que parler et dire que “non, ça ne va pas aujourd’hui“, et juste expliquer qu’en ce moment, et bien, ce n’est pas le “bon” moment pour cette raison précise, ça permet aussi aux autres de comprendre vos éventuelles réactions et de ne pas vous en tenir rigueur. Cela peut aussi expliquer pourquoi vous n’êtes pas “dedans” au travail, permettre à vos proches de vous rassurer et ainsi vous aider et vous soutenir au mieux pendant ces jours pas très rutilants.

Nous avons la chance d’être tout de même dans une époque bien plus compréhensive qu’autrefois, et ce qu’on faisait passer pour de l’hystérie en 1800 et vous faisait vous retrouver internée en moins de temps qu’il n’en faut pour dire “plein la cup”, à la Salpêtrière avec Charcot (je lis un bouquin d’ailleurs fascinant sur ce sujet dont j’espère vous parler bientôt) peut être simplement réglée (c’est le cas de le dire) en s’exprimant aussi simplement que cela. En tout cas, la part de Drama Queen qui sommeille en moi a toujours besoin de théâtraliser cette période pour mieux la faire passer ! Autrement, je serai prête à arracher plus de chair que dans un épisode de The Walking Dead, (et Dieu sait pourtant que je suis végétarienne !)

Le second article aura donc pour vocation de parler de protections périodiques non toxiques pour soi et la planète mais également de contraception et de règles. Tout un programme ! En attendant, je vous laisse avec cette vidéo de 1946 (dont quelques unes des illustrations de ce post sont extraites) de près de 10 minutes, découverte parfaitement par hasard et créée par Walt Disney pour expliquer les menstruations aux jeunes filles. Bien qu’elle ne soit pas parfaite (loin s’en faut), elle a au moins le mérite d’exister et de mettre le doigt sur le sujet à une époque où tout cela était encore très tabou. Bon visionnage !

Dans ma bibliothèque… #3 Femmes féminines et féministes

« Reading gives us somewhere to go when we have to stay where we are. » (Lire nous donne quelque part où aller quand nous avons à rester là où nous sommes)

Dernièrement je me suis plongée dans le destin de deux femmes qui, même si elles ne sont pas de la même époque, partagent une force et une détermination sans limite, et une féminité exacerbée qui n’entrave pourtant pas leur indépendance et leur féminisme.

Sens Dessus Dessous – Chantal Thomass (Editions Michel Lafon)

Je ne vais pas passer par quatre chemins : j’ai dévoré cette autobiographie car je suis une grande admiratrice du travail de la célèbre couturière de lingerie Chantal Thomass. J’ai eu la chance de rencontrer cette femme souriante et fascinante par deux fois, et j’avais forcément envie d’en découvrir davantage sur son parcours. Mon avis est donc forcément assez subjectif sur la question.

Et pour moi qui ne la connaissais de notoriété que depuis quelques années finalement, de par son travail audacieux et raffiné en lingerie, puis au travers de nombreuses collaborations comme pour le Crazy Horse (dont je parle ici d’ailleurs), j’ai été subjuguée par son parcours et sa détermination. Sans vous dévoiler tous les rebondissements, les succès et les embûches qui se sont dressés sur son chemin, j’ai une fois de plus compris, dans cette période transitoire pour moi qui suis en pleine reprise en main de ma vie, que rien n’arrive au hasard et que seul le travail, l’acharnement et le talent peuvent vous mener vers la réussite et que les déconvenues sont malheureusement souvent présentes derrière les paillettes et qu’elles font partie du “jeu”.

Mais je ne suis pas là pour parler de moi, mais de Chantal ! Et moi qui raffole de ses collants et bas toujours originaux et féminins, j’ai d’ailleurs appris qu’elle était la première personne au monde à inventer le collant dit “fantaisie” ! C’est aussi grâce à elle que nous devons la démocratisation d’une lingerie féminine et de qualité dont elle a le secret, elle qui a osé mettre ces pièces destinées à être camouflées sous les vêtements sur le devant de la scène, lorsqu’elle créait encore du prêt-à-porter en n’hésitant pas à dévoiler un corset sur un vêtement ou un soutien-gorge comme un habit de sortie. Car peut-être ne le savez-vous pas, mais même si Chantal Thomass est associée immédiatement à la lingerie, elle a pourtant débuté,  à l’époque du Palace et des grands couturiers Français comme Kenzo, Jean-Paul Gaultier ou encore Christian Lacroix dans le monde de la Haute Couture. Ce sont d’ailleurs grâce (entre autre) à ses défilés époustouflants et avant-gardistes que son nom a commencé à se faire connaître.

Je ne vous en dis pas vraiment plus car ce livre recèle de rebondissements et me semble être une leçon de vie incroyable et authentique sur le monde de l’entreprenariat et de la mode vu par le prisme d’une femme – et quelle femme ! J’étais aussi ravie de voir que nous partageons le même point de vue sur la féminité, notamment concernant la lingerie : beaucoup de féministes se sont insurgées contre l’image que Chantal Thomass pouvait véhiculer des femmes, à savoir une féminité exacerbée, pétillante, audacieuse, malicieuse, parfois même à la limite de l’érotisme.

Un peu comme si porter une lingerie aussi polissonne et coquine assujettirait les femmes à un rôle d’objet, cherchant coûte que coûte la séduction et l’approbation dans le regard masculin. Or c’est justement tout le contraire : et si la lingerie et les apparats féminins ne servaient qu’à se séduire soi-même ? Pourquoi ne devrait-on porter de jolis sous-vêtements que lorsque nous avons un rendez-vous galant ou pour séduire l’autre ? Se séduire et se faire plaisir à soi-même est la véritable priorité, et si par la même occasion nous réussissons en chemin à séduire d’autres personnes, alors c’est encore mieux, non ? Le sujet me semble d’ailleurs assez proche de l’univers du Burlesque et de la féminité sur scène qui, bien au contraire, confère un certain pouvoir et une domination (relative) en acceptant de se montrer nu(e).

En somme, ce livre a résonné en moi de bien des manières, alors Madame Thomass, si vous passez par là, merci ! 

A lire si… vous aimez la lingerie, la féminité, les parcours de femmes fortes et déterminées, mais aussi si vous vous intéressez au berceau de la création de la mode Française !


L’espionne – Paulo Coehlo (Editions Flammarion)

L’écrivain Paulo Coehlo connu notamment pour son célèbre livre “L’alchimiste”, que j’avais lu, il y a des années de cela, s’est intéressé à l’histoire de la “première” véritable effeuilleuse, Mata Hari, qui a endossé de nombreuses casquettes, outre son talent pour la danse : courtisane, femme libre et espionne pour la France (rien que ça, oui). Son destin aussi tragique (elle a été fusillée à Vincennes, ville que je chéris pourtant sous bien des aspects…) que passionnant m’avait interpelée et j’avais envie d’en savoir davantage sur cette femme hors du commun et visiblement très en avance sur son époque.

Malheureusement je n’ai pas été transcendée par le récit de Paulo Coehlo, non pas que l’histoire n’était pas intéressante, puisque j’ai trouvé le personnage de Mata Hari fascinant (et je compte d’ailleurs compléter cette lecture avec d’autres documentations sur ce sujet), mais j’ai trouvé cet ouvrage un peu trop superficiel à mon goût. J’ai eu la désagréable sensation de survoler des épisodes de sa vie qui pourtant me semblaient décisifs, et bien que l’on sente un véritable travail de détails et d’authenticité de la part de l’auteur sur l’historique, je suis restée sur ma faim/fin. A la place, l’auteur digresse en sujets philosophiques pour donner du relief à l’histoire, mais cela m’a finalement perdue en route.

Je suis cependant contente de ce premier aperçu sur le destin de cette femme iconique, féminine et indépendante (c’est ce qui l’a d’ailleurs perdue…) puisqu’il m’a tout de même donné envie d’en savoir plus et je complèterai ce post avec mes nouvelles lectures.

A lire si… vous souhaitez un aperçu rapide sur le destin de Mata Hari (le livre fait un peu + de 200 pages, donc rapide à lire) ou si vous êtes un fan de Paulo Coehlo car on y retrouve son style d’écriture et ses réflexions philosophiques.

Un jean et des Converse roses.

{Préface : ce texte a été écrit il y a 6 mois. J’ai longtemps hésité avant de le publier – allez savoir pourquoi ? – et je me suis finalement décidée à le mettre en ligne, car j’ai été à nouveau témoin d’une anecdote similaire dans le métro. Cette fois, je n’étais pas visée, c’était une jeune femme seule, et mes amis et moi nous sommes interposés. Dans toute sa virilité et son courage, l’homme – ou devrais-je dire la mauviette – qui lui cherchait des noises a déguerpi dès lors que nous nous sommes approchés et lui avons fait face. Preuve supplémentaire que nous devons TOUS élever la voie en de pareilles situations.}

Une fois n’est pas coutume, je ne vais ni parler ni rouge à lèvres, ni cabaret et encore moins de sujets légers pour ce post.
Pourtant, je pense que ce sujet a tout à fait sa place ici, car vous pourriez et avez peut-être été déjà concerné(e)s par le thème que je souhaite aborder. Ce n’est d’ailleurs pas vraiment un thème, c’est surtout une réalité, quelque chose que toutes les femmes ont, malheureusement et j’en ai bien peur, déjà vécu : « le harcèlement de rue ». Est-il vraiment nécessaire de rappeler ce que c’est ? Je pense qu’on a toutes déjà subi ce regard appuyé qui nous rend nerveuse, cette remarque déplacée, sexiste qu’on aurait préféré ne jamais entendre, cet œil inquisiteur qui décortique notre tenue, et parfois, bien plus grave.

J’ai toujours eu le sentiment de vivre « avec » ça, cette peur au ventre le soir en rentrant, cette angoisse de sortir sans collant en été de peur d’être scrutée et dévisagée (cela m’est déjà arrivé), me faire suivre dans la rue puis abordée lourdement alors même que je m’apprête à aller courir tranquillement, que je suis en baskets et n’ai aucune trace de maquillage sur le visage… Et pourtant à chaque fois, impossible de trouver les mots pour me « défendre », faire comprendre à cet individu qu’il me dérange et que son attitude n’est pas acceptable.

Mais ce matin, je me sentais forte. Ce matin, ça n’était pas comme d’habitude. Ce matin, j’avais en tête l’histoire horrible qu’une jeune femme que j’ai rencontrée hier soir a vécu dans le métro il y a à peine 1 mois ( elle va bien). Et ce matin, j’avais envie de m’habiller simplement, en jean et Converse roses. C’est si rare que cela mérite d’être précisé : pas l’ombre d’une robe fourreau, ni d’un collant couture, ni même d’un rouge à lèvres vermeil ! (Et oui, blague à part : il m’arrive aussi de m’habiller le plus simplement du monde et c’est pourtant souvent à ce moment-là que je suis le plus enquiquinée… Les femmes assumées, féminines et renvoyant l’image de personnes sûres d’elles feraient-elles peur à ces messieurs à l’éducation douteuse ?…)

Pour autant, si j’avais eu envie de sortir ainsi, ou même en bikini, en combinaison de ski, ou avec un panier de fruits sur la tête, c’est mon droit le plus total, et personne, pas même votre entourage ne devrait pouvoir un jour vous signifier que vous avez mérité une agression ou un regard déplacé parce que vous étiez habillées d’une manière qu’une personne extérieure juge « inappropriée » ! Mais bref, je digresse.

Ce matin donc, je m’installe, comme tous les matins, à mon terminus, sur un siège qui fait face à un autre siège. Un homme rentre puis s’installe en face de moi. Il n’est même pas assis, que je sens déjà son regard se poser lourdement sur moi. Pendant quelques minutes, je fais mine de m’occuper sur mon téléphone cellulaire, et j’en profite pour le raconter à mes amis via Messenger, comme pour ne pas me sentir seule. Car à ce moment précis, et bien que je ne sois pas seule dans la rame (qui en plus, venait de se bloquer – impossible donc d’en sortir), je me sens affreusement seule, face à cette situation inconfortable.

L’homme, âgé d’une cinquantaine d’années environ, me semble dérangeant et dérangé. Il sort un énorme livre d’art Égyptien (comme quoi, j’aurai presque pu trouver des points communs avec cet énergumène), tourne les pages, tout en continuant de me fixer de manière totalement exagérée. Je me sens rougir, je fais mine de fouiller dans mon sac, mais son regard est encore plus insistant, je le sens. Désormais, il regarde avec attention les moindres détails de ma tenue, jusqu’à se pencher pour voir quelles chaussures sont à mes pieds. Autour de moi, personne ne semble réagir, et le métro, lui, est toujours bloqué. La situation dure plusieurs minutes qui me semblent une éternité.

Il m’était déjà arrivé de vivre pareille situation (et même, bien pire, mais ce n’est plus le sujet), et j’aurai tout à fait pu changer de place, mais ce matin, je n’en avais pas envie. Je me suis installée en premier, et j’ai autant le droit de vivre sereinement mon trajet que cet individu et ce n’est pas à moi de partir, je ne suis pas en tort ! Je pense à ouvrir un livre, pour esquiver son regard, mais je sais pertinemment qu’il me serait impossible de lire les pages avec attention, et de toute façon, je n’ai, d’un seul coup, plus envie d’ignorer son comportement.

Je me décide à me confronter à son regard, en lui lançant un œil noir dont j’ai pourtant le secret ! L’homme ne sourcille pas, et continue de plus belle à me dévisager, et ce jeu semble même l’amuser. Il tournicote les pages abîmées de son bouquin, puis soudain, mon cerveau reptilien se réveille, ne supportant plus l’état d’objet ou de souris face à un chat auquel cet affreux bonhomme semble me reléguer. Je l’interpelle, avec une voix franche et assurée : « Vous avez un problème ?… ». Ah. Pas de réponse. Pensait-il que je resterai muette devant son arrogance ?

L’homme ne dit rien, me fait non de la tête. Je continue : « Non, parce que, depuis tout à l’heure, vous me dévisagez, et cela est très inconfortable et je veux que vous cessiez immédiatement ». Je ne reviens pas d’avoir osé le lui dire, et je lis la surprise, puis la gêne dans son regard. Il continue de se tasser sur son siège, bredouille qu’il est en train de lire, et je répète, encore un peu plus fort ce que je venais de dire juste avant, pour que les personnes présentes dans le wagon puissent comprendre ce qui est en train de se passer.

Les regards se tournent vers lui, une jeune femme me regarde, puis le fixe d’un mauvais œil, c’est désormais sûr : je ne me sens plus seule. Le bonhomme, lui, baisse les yeux, et agit comme un enfant qu’on aurait réprimandé ! C’est désormais lui, qui est mal à l’aise ! Incroyable comme les rôles sont désormais inversés. J’ai peut-être l’air jeune, fragile de par mon petit mètre 60, et je porte peut-être des baskets roses aujourd’hui, mais je ne me laisserai pas faire, et je trouve cela parfaitement inacceptable qu’un prétendu homme, plus grand, plus âgé et plus “fort” que moi puisse penser qu’il est normal de prendre le dessus sur plus “faible” que soi.

Les portes du métro se rouvrent, et c’est le train de la rame d’en face qui finalement doit partir. Je me lève, énervée, et l’homme murmure un « désolé » auquel je ne prête aucune attention, encore bien trop fébrile par la situation.

Je m’installe dans le train d’en face, mais l’homme n’est pas assez rapide (ou bien trop honteux pour rejoindre le train dans lequel tous les voyageurs sont désormais), les portes se ferment, et je le vois me fixer depuis le quai, avec un regard profond. (J’ignore s’il s’agissait là d’une intimidation, mais je crois qu’à ce moment-là mon cerveau reptilien aurait exhorté le félin qui sommeille en moi pour lui bondir à la gorge en cas d’affront supplémentaire.)

La jeune femme qui avait assisté à toute la scène s’installe en face de moi pour me parler et me confirmer qu’elle a remarqué son attitude dérangeante à mon égard. Nous échangeons quelques mots, et, ce matin, je comprends une chose en lui parlant : il ne faut jamais rester silencieuse. Il ne faut jamais rester silencieuse car vous donnez raison à l’individu en face de vous de continuer. Il ne faut pas non plus rester silencieuse, parce que les gens autour de vous ne voient pas (ou parfois ne veulent pas voir) une situation inacceptable, mais énoncer à haute voix ce que vous vivez et en informer les personnes autour de vous peut désamorcer un contexte d’insécurité, comme ça a été le cas pour moi ce matin.

C’est loin, très loin, d’être la pire anecdote que j’ai vécue et encore plus loin de celle d’autres jeunes femmes malheureusement, je le sais bien, mais celle-ci m’a marquée aujourd’hui parce que je m’en suis sortie grandie en osant confronter ce type. Je ne dis pas que ceci serait aussi simple, un soir, seule dans la rue. Mais je suis fière d’avoir pu renverser la vapeur en mettant ce type presque plus mal à l’aise que je ne l’ai été.

Ne restez jamais silencieuse, habillez-vous comme bon vous semble et n’ayez pas honte d’être ce que la nature a fait de vous : des Femmes. Demain, c’est décidé : je ressors mes talons et gare aux vieux schnock et son bouquin d’art Egyptien.

(PS : Pour vous prémunir et sur les conseils de mes collègues, vous pouvez télécharger l’application “HandsAway” pour lutter contre le harcèlement de rue, vous permettre de témoigner et devenir “Street Angel”.)

(Photo : Pin-Up Story photos by Marc Philbert)