Loretta Banana

livre

Dans ma bibliothèque #7 : féminisme & bordels

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(Lire nous donne quelque part où aller quand nous avons à rester là où nous sommes)

[ Préambule ]
Ne me demandez pas pourquoi, mais j’ai toujours ressenti un vif intérêt pour le milieu des courtisanes. Cocottes, lionnes ou grandes horizontales, peu importe la manière dont vous souhaitez les appeler, elles ont peuplé l’imaginaire collectif (et l’histoire) de leurs frasques, de leur parfum de scandale et de leur aura de mystère. On les a souvent dépeintes comme des femmes émancipées, des figures féministes tout en étant des femmes assumées. J’ai lu beaucoup d’ouvrages à leur sujet et j’ai toujours été admirative de leur détermination : La Belle Otéro, Cléo de Mérode, la Castiglione, et bien d’autres, ont souvent occupé mon imaginaire et mes lectures. (Il y avait d’ailleurs une fantastique visite proposée par un guide tout aussi fascinant au sein du célèbre établissement Maxim’s de Paris, connu pour avoir vu défiler bon nombre de Grandes Horizontales, et dans lequel avait été reconstitué un appartement de cocotte à la belle époque. J’ignore si ces visites sont toujours d’actualité, mais je vous la conseille absolument si le sujet vous fascine ainsi que l’Art Nouveau !)

C’est ainsi donc que j’ai commencé à m’intéresser davantage au milieu des bordels ou, appelons les choses telles qu’elles sont : la prostitution, mais toujours d’un point de vue historique, et jamais pour le fustiger mais pour mieux le comprendre, car il est bien souvent opposé au féminisme, une cause qui m’anime aussi énormément. Pour me faire donc ma propre opinion, j’ai voulu creuser davantage le sujet, car bien souvent les médias n’abordent qu’un seul aspect : le sensationnalisme, la victimisation et le racolage. Je pense que comme pour toute thématique, la réalité est bien plus contrastée.

Ceci étant dit, je vais rentrer davantage dans le vif du sujet et vous parler littérature, puisque c’est ce qui nous intéresse aujourd’hui.

Pour commencer, j’aimerais parler du livre le Guide historique du Paris Libertin que j’ai beaucoup apprécié, puisqu’il mélange habilement histoire et “galanterie”. On y découvre tous les lieux qui ont rythmé la vie sulfureuse des Parisiens dans les années 20, le tout ponctué de photos et d’anecdotes, et c’est fascinant ! J’ai par exemple découvert que l’appellation de “Lorette” était donnée aux jeunes élégantes vivant de leur relation avec ces messieurs – et non, je vous vois venir, mon pseudo ne vient pas de là – en partie du fait que le quartier de Notre-Dame-De-Lorette, alors en pleine construction, abritait leurs amours secrètes. 

« Je suis coquette
Je suis lorette,
Reine du jour, reine sans feu ni lieu !
Eh bien ! J’espère
Quitter la Terre
En mon hôtel… Peut-être l’hôtel-Dieu… » 

C’est dans cette optique que je souhaite vous parler de deux ouvrages que j’ai lus. Presque 100 ans les sépare (l’un est daté de 1928, l’autre de 2019) et pourtant, ils relatent tous les deux la même chose : la narration d’une jeune femme, journaliste pour la première, écrivaine pour la seconde, dans le milieu des bordels. Bien que ces deux livres n’aient rien en commun dans l’écriture et le récit, ils relèvent chacun du domaine du “reportage en immersion”.

Je vais tout d’abord vous parler du plus ancien :

Livre N°1 : Maryse Choisy – Un mois chez les filles

J’avais déjà lu ce livre il y a un moment et avais effleuré son sujet ici

Le contexte :
Maryse Choisy, journaliste et “femme du monde” comme elle aime à le rappeler à plusieurs reprises, se décide à enquêter dans le milieu très fermé de la prostitution parisienne. Rédigé en 1928 et écoulé à plus de 450 000 exemplaires, ce livre fait naturellement scandale et… couler beaucoup d’encre ! Elle endosse tour à tour le rôle de femme de chambre, de danseuse dans un bar lesbien et parvient même à s’introduire dans les dancings de la pègre, pour relater, analyser en toute discrétion les dessous d’un monde obscur et mystérieux. 

Ce que j’en ai pensé : j’ai lu à plusieurs reprises que cet ouvrage était profondément féministe, et même si je trouve l’audace et le courage de Maryse Choisy remarquables (car rappelons tout de même que ce genre de récit est risqué et totalement nouveau pour l’époque), je suis plus mitigée sur l’aspect féministe. Elle n’hésite pas à rabaisser certaines catégories de femmes dans l’optique de mieux mettre en valeur son statut de “Femme du monde”, ce qui à mon sens est éloigné de la définition de féminisme actuel comme je l’entends.

D’autre part, si vous souhaitiez des révélations choquantes, il vous faudra passer votre chemin (et plutôt vous rabattre sur le livre suivant) : certes, ses écrits ont scandalisé ses contemporains, mais d’un point de vue de personne vivant au 21e siècle, l’aspect sulfureux s’est érodé avec le temps. Hormis cela, son récit est passionnant, ponctué de réflexions personnelles intéressantes et qui permettent de s’imaginer ce que devait être la société de son temps.

J’ai aimé ressentir la passion qui l’animait en écrivant ces lignes, son ton parfois moqueur, souvent sournois, et diablement en avance pour l’époque.


 

Livre N°2 : La Maison – Emma Becker

Le contexte :
On reprend le même environnement que pour l’ouvrage précédent, mais cette fois-ci en Allemagne, au 21e siècle. On mélange le tout, et cela donne le livre La Maison d’Emma Becker. 
Cette toute jeune Française, écrivaine de son état et dont j’ignorais l’existence auparavant, réside à Berlin, en Allemagne. Pour les besoins d’un futur ouvrage (ou pour se connaître elle-même, j’aurais plutôt tendance à penser), elle décide de rejoindre une maison close légale, puisque la prostitution est acceptée et tolérée en Allemagne. 

Au travers de son roman, elle dissèque ce monde inconnu, parle de ses collègues, de ses clients, de sa vie, en somme.

Ce que j’en ai pensé :

Premier constat : 100 ans après Maryse Choisy, rien n’a vraiment changé. Faire le choix de la prostitution comme décision assumée semble préjudiciable aux yeux de la société. J’ai regardé beaucoup de reportages, écouté des podcasts traitant de son livre, et les avis semblent toujours en demi-teinte. Comme si le fait d’embrasser ce choix était inacceptable, que la société avait à valider – ou non – le bien-fondé de sa démarche. Et rien que pour ça, j’ai eu envie de la lire ! Car que cela plaise ou non, n’importe quel humain, a le droit de disposer entièrement de son corps.

Toutefois, vous dire que j’ai adoré ce livre serait un mensonge. Mais vous affirmer le contraire le serait tout autant. J’ai lu ici et là que ce récit était un hommage déguisé à la prostitution. Ce n’est pas totalement faux, mais il s’agit surtout à mon sens d’une démarche personnelle très intime, très ancrée en elle, qui bien sûr, peut choquer, puisqu’elle va totalement à contre-courant de la bienséance (feinte) que la société souhaite nous projeter. Et grand diable, vous pensez : une femme qui dispose de son corps et fait de l’argent avec ? Mais vous n’y pensez pas ! 

Bref, c’est par curiosité et féminisme que j’ai eu envie de lire son expérience. Je ne veux pas vous spoiler son récit, mais je suis loin d’avoir accroché avec tout. Et contrairement à l’ouvrage de Maryse Choisy, l’omniprésence de scènes de sexe avant même son arrivée dans la Maison dans laquelle elle travaillera est, je trouve, un peu à côté de la plaque et pas forcément utile, tout comme la banalisation de la drogue qui revient à tout bout de champs. Je comprends qu’elle ait pu en avoir “besoin” pour tenir le choc, mais c’est le fait qu’elle le banalise un peu avec nonchalance qui m’a chiffonnée.

Le tout manque, à mon goût, (car encore une fois, ce n’est que mon humble avis !), de cohérence et de structure, et j’ai parfois trouvé son ton très condescendant, voire hautain. J’avais du mal à me sentir proche d’elle et à me projeter dans son expérience à cause de cela. Néanmoins, je dois tout de même dire que j’ai été très absorbée par son récit, et que j’ai lu son livre très rapidement. Malgré mon agacement parfois, je n’arrivais pas à lâcher mon bouquin, et j’ai trouvé sa démarche courageuse et nécessaire car tout le monde n’en aurait pas été capable, et j’ai vraiment senti que cela relevait d’un désir plus personnel que la rédaction d’un livre.

Ce que j’ai aimé par-dessus tout, et c’est pour ça que je vous conseille ce livre au final, c’est son amour des femmes et du féminin. Finalement, la prostitution n’est qu’une toile de fond, et même si certains clients sont évoqués, ce sont les femmes, qui sont les héroïnes de son récit. J’ai senti une vraie cohésion entre ces femmes, une admiration aussi de leur beauté, de leur féminité. Certains passages où elle prend le temps de détailler ses collègues, leur allure, leur personnalité, sont émouvants et très beaux. Une dimension qui manque cruellement au livre de Maryse Choisy.

Enfin, je me suis retrouvée sous un aspect qui la pousse à cette expérience : sa recherche de féminité. Elle évoque sans détour son obsession pour les femmes, et plus globalement sur la recherche de féminité, dans ses yeux et dans ceux des autres, quelque chose qui m’a toujours animée, depuis toute petite. J’en parle d’ailleurs ici. Et d’une certaine manière, c’est ce qui m’a aussi poussée dans le burlesque. Alors même si je n’irai jamais vendre mes charmes dans une maison close (avouez que vous y avez cru un quart de seconde hahaha), j’ai dans un sens, compris sa démarche profonde.


Cette curiosité m’a donc tout naturellement amenée à me documenter sur ce que la prostitution voulait dire aujourd’hui. J’ai écouté de nombreux podcasts à ce sujet, dont voici ceux que je vous conseille en priorité :

– “Prostitution : ceux qui disent oui, ceux qui disent non” de Binge Audio 

– Ensuite, je vous conseille vivement “Le Putain de Podcast réalisé par Loubna, une ancienne TDS et qui, chaque mois, invite une personne travaillant dans ce milieu. On est très loin des stéréotypes véhiculés par les médias, j’ai appris énormément de choses, cela déconstruit totalement les préjugés de manière simple et humaine. C’est vraiment un contenu de grande qualité, qui devrait être écouté par tous/tes.

– Enfin, ma douce amie Maty m’a conseillée une série de 10 épisodes de podcasts produits par Nouvelles Ecoutes, intitulée “La politique des Putes”. Le thème est ici également abordé par des TDS. Je trouve ce podcast plus politiquement engagé que le précédent, mais c’est justement ce qui m’a plu, il m’a ouvert de nouvelles perspectives de pensée et d’interrogations. Beaucoup de questions sociétales y sont soulevées, car finalement on peut légitimement se demander, par extension, si la sexualisation n’est pas une forme de prostitution ? Bref, vous l’aurez compris, ce podcast est extrêmement riche et vraiment édifiant, j’ai trouvé chaque témoignage fort et extrêmement courageux.

Enfin, que l’on soit bien clair : je ne débattrai pas de savoir ici, si oui ou non, la prostitution devrait être interdite ou tolérée voire même acceptée (même si en filigrane, j’imagine que vous devez vous faire votre idée), non pas que je n’ai pas d’avis là-dessus, bien au contraire, (j’en ai un et je le crois honnête) mais plutôt de simplement vous exposer divers contenus pour enrichir votre opinion. Je n’ai de toute façon pas la prétention de balayer tous les tenants et aboutissants et il serait d’ailleurs impossible de tout faire tenir en un seul et même article qui puisse être digeste pour vous. Toutefois, il est possible que je publie d’autres articles en fonction de mes prochaines lectures (même s’il est fort probable que ceux-ci traitent de ce sujet dans l’histoire, qui est tout de même le pans qui attire le plus mon attention).

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Vous pouvez consulter les précédentes éditions de ma série “Dans ma bibliothèque” : Glamour Hollywoodien // Destins de femmes féministes // Roaring 20’s & babydolls // “Esprit es-tu là ?

Frissons #1 : Le Dahlia Noir

Ah… Los Angeles, son cinéma Hollywoodien, ses paillettes, ses décors en carton-pâte et… ses étoiles du 7e art ! Et c’est précisément du vieil Hollywood et de ses starlettes dont je vais vous parler aujourd’hui, mais d’une manière un peu plus sinistre que ce à quoi vous pourriez vous attendre. (La Californie et plus précisément Los Angeles, regorgent d’histoires sordides dont je suis absolument friande, surtout si celles-ci mélangent faste d’autrefois et horreurs en tout genre.)

Si beaucoup des stars déchues, telles Marilyn Monroe ou encore Jayne Mansfield, ont trouvé la mort directement (ou tout du moins en partie) à cause de leur succès, il en est une qui a trouvé le succès dans la mort. Funeste destin, non ? Mais nous sommes à Los Angeles, et là-bas, tous les fantasmes, même les plus macabres, y sont permis.

L’HISTOIRE DU DAHLIA NOIR

La jeune femme dont je veux vous parler aujourd’hui se prénomme Elizabeth Short, et elle a été assassinée en janvier 1947 alors qu’elle n’avait que 22 ans. On la connaît plus communément sous le nom énigmatique de Dahlia Noir, pseudonyme qui lui a été donné par les habitués d’un bar de Los Angeles dans lequel elle aimait traîner, en raison de sa beauté et de ses tenues, toujours noires, ainsi que de sa chevelure habillée d’un dahlia. Un an auparavant sortait également le film Le Dahlia Bleu, et il est fort probable que l’oeuvre ait certainement dû les inspirer d’une manière ou d’une autre.

Cette femme d’une grande beauté s’était installée à Los Angeles avec l’espoir d’y trouver la gloire, en espérant, comme beaucoup des jeunes femmes de son âge, percer dans le cinéma et devenir une icône du tout Hollywood. Malheureusement pour elle, le succès est arrivé, mais seulement après sa mort, lorsqu’elle fut retrouvée mutilée dans un terrain vague d’un quartier de Los Angeles, qui n’était à l’époque pas habité (la ville est encore en construction à ce moment-là).

Loin d’être un crime ordinaire, le Dahlia Noir présente tous les éléments nécessaires à la pression médiatique : une jeune femme jolie et sauvagement assassinée : elle a été démembrée – son corps coupé en deux – vidé de son sang, lavé, et pire encore : sa bouche est entaillée d’une oreille à l’autre, l’affublant d’un ersatz de sourire démentiel, semblable à celui du Joker dans Batman.

Tous les ingrédients sont là pour hisser cet assassinat sordide en thriller morbide populaire qui, plus de 70 ans après, continue de fasciner. Et pour cause : son assassin n’a jamais été vraiment identifié. Pire : les élucubrations souvent délirantes pullulent encore aujourd’hui à son sujet, et de nombreux ouvrages n’ont cessé de voir le jour, ici et ailleurs, pour tenter de démasquer le tueur. Qu’il s’agissent de Janice Knowlton et son “Daddy Was the Black Dahlia Killer“, publié en 1995 ou Steve Hodel et son “Black Dahlia Avenger“, sorti en 2003, la conclusion reste la même : tous deux affirment, (en “oubliant” certains éléments discréditant qui viendraient contrer leur verdict) que leur père est bel et bien l’assassin du Dahlia Noir.

Mais ils sont loin d’être les seuls à divaguer en élucubrations, et de nombreux quidams un tant soit peu illuminés se sont, au fil des années, eux aussi réclamés d’être l’assassin du Dahlia Noir. Toujours est-il que ni la police, ni les services d’enquête ou même les journalistes n’ont pu percer ce secret, laissant planer le mystère du Dahlia Noir des dizaines d’années après.

Pour aborder le sujet, je vais vous parler de l’affaire sous différents prismes : un podcast, un roman, un film et une enquête.

LE PODCAST : L’affaire du Dahlia Noir dans “L’heure du Crime”

Si cette longue introduction vous a intrigué.e.s, alors je ne peux que vous conseiller de prendre 40min de votre temps pour écouter le podcast de Jacques Pradel sur le sujet. Il m’est difficile de vous raconter les détails de cette histoire ici, d’une part car certains d’entre eux sont particulièrement violents et horrifiants, mais il y a surtout beaucoup trop à dire. Ce podcast est une vraie mine d’or, tant sur l’histoire d’Elizabeth Short que sur les interviews des intervenants de l’émission : deux principales théories se font face, celle de Steve Hodel (dont je vous parlais un peu plus haut), un ancien flic américain qui accuse son père, un chirurgien haut placé, d’être le tueur du Dahlia Noir. De l’autre, c’est l’écrivain et expert criminologue Stéphane Bourgoin qui prend la parole pour défendre une autre hypothèse, celle d’un serial killer connu pour d’autres faits, tout aussi sordides.

En lisant la suite de l’article, vous constaterez que j’ai déjà ma petite opinion sur le sujet, et que c’est à mon sens cette deuxième théorie qui me semble la plus probable. Mais avant d’en discuter, je vous invite vivement à écouter le podcast pour vous familiariser avec le sujet.

LE ROMAN : Le Dahlia noir de James Ellroy

Il y a environ un an, je m’étais déjà plongée dans l’histoire du Dahlia en me consacrant à la lecture du livre de James Ellroy. Un roman noir, extrêmement haletant, lourd en rebondissements et absolument addictif. L’histoire reprend la trame principale de l’assassinat du Dahlia Noir, toutefois, l’énigme trouve finalement un assassin, ce qui, comme vous l’aurez compris, n’est pas le cas de la vie réelle. Il s’agit donc d’une fiction, qui reste néanmoins fidèle à certains détails, et dans laquelle j’ai adoré me plonger, à savoir dans un Los Angeles abyssal, sombre et angoissant. Une lecture que vous devriez ajouter à votre liste, même si elle ne reste que de la fantaisie, un produit dérivé supplémentaire à ajouter au cold case du Black Dahlia.

LE FILM : Le Dahlia Noir de Brian de Palma

C’est précisément par ce biais que j’ai été confrontée, il me semble, pour la première fois à l’histoire du Dahlia Noir. Un film noir, à l’ambiance oppressante et pourtant terriblement esthétique, signé du Maître en la matière, Brian de Palma. Je ne vais pas m’étendre en détails sur ce film car je suppose que beaucoup d’entre vous ont certainement dû déjà le voir, mais cela reste, et cela me regarde, un très bon film, malgré les critiques plutôt mitigées.

Une fois de plus, ne comptez pas sur cette oeuvre pour résoudre le mystère, elle est une adaptation pure et simple du roman dont je vous ai parlé juste au-dessus, par James Ellroy. Toutefois, je ne boude pas mon plaisir lorsque l’on me sert un Josh Hartnett affublé d’un style 40’s et que j’ai le plaisir de profiter d’un Los Angeles aussi beau que hanté par des âmes torturées.

L’ENQUÊTE : “Qui a tué le Dahlia Noir ? L’énigme enfin résolue” – Stéphane Bourgoin

Nous y voilà. C’est certainement l’un des livres les plus éprouvants mais les plus fascinants qu’il m’ait été donné de lire. Près de 500 pages d’enquête, aussi effroyables qu’addictives. J’ai réservé cette lecture à mes trajets en transport en commun, mais croyez-moi, il m’était difficile de ne pas rouvrir ce livre une fois arrivée chez moi. (Mais comme je ne tiens pas à cauchemarder de tueurs en série, j’ai préféré le laisser dans mon sac !)

Stéphane Bourgoin, si vous ne le connaissiez pas déjà, est un auteur spécialiste en criminologie, et plus particulièrement sur le sujet des tueurs en série (thème Ô combien fascinant, s’il en est). Il est aussi un enquêteur hors pair, et c’est bien ce qui ressort de cette lecture. L’écrivain a en effet une quête obsessionnelle, celle de trouver le tueur du Dahlia Noir. Fasciné depuis très longtemps, il avait déjà, il y a bien des années, rédigé un premier livre sur ce sujet. Toutefois, cette dernière enquête extrêmement (et la plus) aboutie, est le travail de vingt très longues années et le fruit de nombreuses investigations, qui mène finalement l’auteur a révélé – selon lui – l’identité du tueur.

Il passe au peigne fin toutes les théories, des plus abracadabrantes aux plus plausibles, livre les détails les plus incroyables sur l’enquête, souvent même déconcertants (notamment sur le suivi de police des plus hasardeux), et truffe le livre de photos qui illustrent son récit. Je dois toutefois vous mettre en garde : toutes sont en noir et blanc (donc visuellement moins agressives) mais certaines sont difficilement soutenables pour les âmes sensibles. (Autant vous dire que je n’osais pas regarder les gens qui avaient le malheur de profiter de ces images lors de mes lectures en métro…)

Je ne saurai vous en dire plus, car je ne compte ni vous spoiler ni vous résumer 500 pages en quelques lignes, mais à force de recoupements, de persévérance et de raisonnement logique, je dois dire que la théorie de Stéphane Bourgoin m’a convaincue. Toutefois, même si les faits sont souvent difficiles et le contenu bouleversant, l’auteur écrit avec une légèreté et une fluidité fascinante, ce qui rend la lecture, du moins sur sa forme, très facile, intelligible et rapide, en dépit de tous les détails qui y sont passés au crible.

Décortiquer autant de faits et d’éléments minutieux, les rapprocher et les étudier face à d’autres meurtres de tueurs en série a dû être un travail de titan (et je comprends mieux qu’il ait fallu tout ce temps pour retracer un crime vieux de 70 ans). Je me suis également posée de nombreuses questions sur les raisons de tout ce battage médiatique autour du Dahlia, tant d’années après. Sur ma propre fascination, même, sur ce crime sordide, et sur ce qu’elle dit sur notre société. Mais c’est un élément de plus qui restera énigmatique. Le Dahlia Noir restera pour toujours auréolé d’un voile de mystère, une réflexion que James Ellroy a su parfaitement mettre en mots. Ils seront la conclusion de cet article.

« Le Dahlia noir est un fantôme, une page blanche qui exprime nos peurs et nos désirs. Une Mona Lisa de l’après-guerre, une icône de Los Angeles. »

Dans ma bibliothèque… #5 : Esprit, es-tu là ?

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Pour ce 5e volet dans ma bibliothèque, je vous emmène dans un univers un peu plus macabre que ce que vous avez l’habitude de voir sur ce blog, et pourtant il fait entièrement partie de moi ! Je sais bien qu’Halloween est encore loin (trop loin même), mais y-a-t-il vraiment un moment spécial pour parler fantômes et revenants ? Soyez pourtant rassuré.e.s : vous n’avez pas besoin vraiment d’y croire pour apprécier la sélection qui suit ! Par contre, je ne peux pas vous garantir que vous n’aurez pas quelques frayeurs nocturnes à la lueur de la bougie ce soir en lisant la suite !

Patricia Darré – Il y a quelqu’un dans la maison (Editions Michel Lafon)
J’ai découvert Patricia Darré via le podcast “Hondelatte Raconte” présenté par Christophe Hondelatte. Le journaliste a en effet dédié l’un de ses épisodes aux histoires surprenantes de cette medium, révélée sur le tard, puisqu’elle est initialement animatrice radio et journaliste. Je vous invite vraiment à écouter cette émission car son parcours est véritablement étonnant et a même su semer le trouble parmi les sceptiques que je connais… Sans trop vous spoiler, elle a été réveillée non pas un beau matin, mais une “belle nuit” par ce qu’elle appelle désormais sa “hiérarchie”, par le biais d’une écriture automatique (vous vous mettez à écrire sous l’impulsion d’une force autre que votre propre personne), pour l’informer qu’elle devait exploiter à partir de ce jour ses capacités extra-sensorielles.

Il ne m’aura donc pas fallu longtemps pour me décider à plonger dans son dernier ouvrage dans lequel elle revient sur plusieurs “affaires” (emprise, objet possédé, maison supposée hantée…) dont elle a été témoin et pour lesquelles elle a participé à leur résolution. Chaque histoire correspond à un chapitre ce qui rend la lecture fluide et agréable, la plume de Patricia n’y étant pas étrangère non plus, vous vous en apercevrez. Elle ponctue ses “anecdotes” (qui n’ont rien d’anecdotique, je vous le garantie) d’informations sur l’intuition, l’au-delà et d’autres considérations médiumniques.

Mon expérience personnelle sur le long terme (dont je ne souhaite pas parler ici dans le détail) m’a confortée à plusieurs reprises sur l’existence d’un au-delà, et pourtant, même avec cette croyance inébranlable, les expériences de Patricia laissent sans voix. Soyons bien clairs : je ne doute pas de sa parole (car cela m’agace quand on peut douter de la mienne sur le sujet), mais on touche vraiment à de l’incroyable. D’ailleurs, je salue Patricia, si elle venait à lire ce post, pour son courage car je ne sais pas comment je réagirais en de pareilles situations !

Pour autant, je pense que ce livre pourra parfaitement distraire des curieux ou des sceptiques, car ces petites histoires sont divertissantes et m’ont fait dresser les poils à plus d’une reprise ! Finalement, peu importe que vous y croyiez ou pas (ce livre n’a aucunement, je crois, la vocation de vous convaincre), la plume de Patricia saura vous emmener dans un monde de l’invisible pour éveiller tout du moins votre curiosité.

A lire si… vous êtes amateurs de creepypasta ou d’histoires fantomatiques, vous appréciez les histoires de revenant un peu mélancoliques, les films de poltergeist ou plus sérieusement si vous pensez qu’il se passe quelque chose “de l’autre côté” ou en êtes simplement curieux.


Erick Fearson – Le manuel du Chasseur de Fantôme 

Alors, si je peux émettre une (et la seule) critique sur ce livre, c’est son titre. Car je ne trouve pas qu’il le définisse tant que ça, bien que cet ouvrage donne toutes les clés pour aller capturer de l’ectoplasme, si vous tentiez de chasser l’ennui un dimanche dans une maison abandonnée !

Plus sérieusement, j’ai vraiment A-DO-Ré ce bouquin tant tout ce qui est évoqué l’est fait avec bon sens, rationalité (oui oui !) et pragmatisme. Erick Fearson, son auteur, est un médium et mentaliste et livre ici tout son savoir (ou ce qu’il accepte de nous livrer) sur un sujet qui fascine autant qu’il effraie. J’ai eu l’envie de lire ce livre car j’avais parcouru de nombreuses critiques très positives à son sujet, et surtout je cherchais des explications, des bribes de compréhension sur des expériences sur le long terme mais parfois plus épisodiques que j’ai vécues chez moi ou à l’extérieur, plus ou moins récemment, comme je l’expliquais plus haut, et qui me font penser qu’un monde invisible nous entoure.

Tout cet univers peut paraître bien saugrenu à certain.e.s (voire très effrayant) et je l’entends complètement, mais croyez-moi : vivre certaines expériences sans pour autant les avoir provoquées peut être parfois déroutant (et ce d’autant plus si on met en doute votre parole) ! Aujourd’hui, je n’ai absolument plus “peur” (ou presque) des fantômes, des esprits ou des âmes, appelez cela comme vous voulez, et ce livre m’y a beaucoup aidée !

Erick Fearson passe en revue de nombreux sujets, à savoir les différents types de hantises qui peuvent être rencontrées (je n’imaginais pas qu’il y en avait autant), comment celles-ci se manifestent, de quelle manière les appréhender, mais aussi comment les détecter en chasse de fantôme (c’est dans ce chapitre que vous enfilez votre attirail de Ghostbuster). Personnellement, je ne m’y suis pas amusée, mais avec le recul j’aurai beaucoup aimé lire ce bouquin à l’époque de la maison de mon enfance ^^

Who you gonna call?

D’autres thématiques sont également évoquées, notamment sur l’histoire du spiritisme, mais aussi sur les différents lieux hantés de France… Et les pages se dévorent à une vitesse fulgurante ! En somme, j’ai vraiment apprécié cette lecture et je l’ai d’autant plus savourée que son auteur prend beaucoup de pincettes sur certains événements supposés provenir de l’au-delà alors qu’il s’agit, la plupart du temps, d’un simple phénomène naturel, d’un rongeur, d’un charlatan ou juste d’un mirage de l’esprit, conditionné par un environnement propice à ce type de phénomène. (Vous pouvez être sûr.e.s que vous verrez apparaître une ombre fantomatique, fruit de votre imagination, si l’on vous plonge au coeur d’un château supposé hanté en pleine nuit !)

En somme, j’ai beaucoup aimé la rationalisation et les appuis scientifiques qui sont apportés tout au long de la lecture, sans pour autant perdre de vue que certaines choses restent du domaine de l’inconnu et ne peuvent être expliquées. Enfin, en tout cas, vous trouverez quelques clés pour mieux les comprendre !

A lire si… vous vous rêvez ghosbuster, que vous avez vécu une ou plusieurs expériences paranormales, ou simplement que cet univers vous passionne !

Pour clôturer ce post : non, je ne vous inviterai pas à un meet-up ouija ni pour faire tourner le guéridon du Phantom Manor à Disneyland Paris (quoique…), pas plus que je ne cherche à vous convaincre sur l’existence de ce monde invisible ! Pour autant, ces deux lectures m’ont semblé extrêmement riches d’enseignements et ne sont pas destinées qu’à des personnes ayant vécu une expérience avec l’au-delà. J’en parle simplement car je les ai appréciées et à titre personnel, j’estime que ce n’est pas parce que nous ne voyons pas certaines choses que celles-ci n’existent pas, et que ce monde, s’il est bien réel, a bien plus à nous offrir et nous enseigner que de le dépeindre vulgairement et de manière caricaturale comme une âme avec un drap blanc sur le visage. 

J’espère que cette incursion dans un recoin sombre de ma bibliothèque vous aura plu ! Et n’oubliez pas de regarder si rien ne se cache sous votre lit cette nuit !

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Pour ce nouveau volet des bouquins de ma bibliothèque, j’aimerais vous parler de deux histoires radicalement différentes mais qui ont rythmé avec douceur mon mois de janvier.

Les Indomptables – Florence Colombani (Fayard)
La première n’est pas une histoire, mais plutôt 4 histoires, et vraies, qui plus est ! 4 destins de femmes qui ont peuplé les fantasmes du cinéma Hollywoodien : Lana Turner, Ava Gardner, Lena Horne et Grace Kelly. L’auteur de ce petit bijou, Florence Colombani, a su tisser un véritable roman, dans lequel s’entremêlent les biographies des 4 actrices, de manière à raconter une histoire globale, celle finalement d’actrice sous les cieux de la cité des Anges lors de l’âge d’or Hollywoodien. En dépit des paillettes et des bulles qui coulaient à flot, leur vie fut loin d’être un fleuve tranquille, et on y découvre d’ailleurs avec une certaine horreur l’envers du décor, celui du studio célèbre de la MGM, véritable “usine à stars” (et l’expression n’est pas exagérée), tenu d’une main de fer par le terrible Louis B. Mayer.

On y apprend donc beaucoup sur le milieu du cinéma de l’époque, évidemment, mais aussi sur les destins torturés de ces actrices, et notamment comment de fille presque ordinaire à l’enfance souvent difficile (pour Lana Turner et Ava Gardner en particulier), ces diamants bruts deviennent les stars que nous connaissons aujourd’hui. C’est aussi un climat qui nous est compté, celui de l’Amérique ségrégationniste, évoqué sous le prisme de la sublime Lena Horne, actrice et chanteuse de jazz Afro-Américaine, qui, malgré un racisme ambiant, se bat pour imposer sa personnalité sur le devant de la scène et sous couple mixte, qui fait polémique à l’époque. Enfin, le roman évoque la toute jeune Grace Kelly dans sa vie dissolue d’avant mariage princier et bien sûr avant qu’elle ne devienne l’actrice fétiche d’Hitchcock.

Vous l’aurez donc compris : ce roman est riche en détails, en anecdotes, et narre toutes les frasques les plus incroyables de ces quatre actrices Américaines, avec cependant une certaine bienveillance de la plume de l’auteure. L’écriture est fluide et agréable, et je dois dire que moi qui craignais de me sentir perdue parfois parmi toutes ces biographies entremêlées, j’ai été étonnée de voir à quel point tout s’imbriquait avec intelligence, sans la rigidité que peuvent avoir certaines biographies.

A lire si… Vous aimez le cinéma, l’âge d’or Hollywoodien, les années 40/50 et que vous êtes fasciné par le glamour d’autrefois ! Cette lecture m’a vraiment ravie, j’ai appris énormément de choses et j’ai ressenti beaucoup d’empathie et de fascination pour ces actrices dont certaines que je connaissais assez peu finalement et pour lesquelles j’ai désormais beaucoup de curiosité et d’admiration !

Ma seconde lecture, bien qu’un peu plus légère au départ a très vite fait de me faire couleur quelques petites larmes…

En attendant Bojangles – Olivier Bourdeaut (Folio)
Ce livre n’avait de cesse de revenir sous mes yeux, peu importe les librairies que je fréquentais. Je n’ai entendu par la suite que des critiques dithyrambiques à son sujet, et la douce folie qui semblait en émaner, sans oublier son titre en référence à Nina Simone ont finalement achevé de me convaincre.
L’histoire ? Une narration racontée par un jeune enfant qui nous emmène dans une aventure humaine et familiale : celle de ses parents, amoureux fous, et fous amoureux. Un peu trop d’ailleurs. Ils vivent dans un joyeux bazar, loufoque et complètement inattendu, ponctué d’anecdotes romanesques et touchantes, mais qui parfois me semblaient partir dans des directions que j’avais du mal à suivre, moi qui suis pourtant toujours la première à plébisciter la douce folie.

Seulement voilà : est-ce parce que j’étais moins disposée à lire ce genre de roman à ce moment-là ou est-ce parce que j’en avais entendu beaucoup trop de merveilles ? Pour moi, le charme n’a fini par opérer qu’aux 2/3 du roman, c’est à dire quand les choses finissent par se gâter un peu (et c’est peu de le dire). Mon côté drama queen, sans aucun doute. Toujours est-il que c’est précisément là, que la folie qui émane de ce livre a fini par me toucher, et m’emmener là où l’auteur semblait vouloir aller. Je ne vous révèlerai pas la fin de l’histoire, mais celle-ci m’a beaucoup touchée, à bien des égards.

A lire si… vous aimez les romans décalés, plein d’émotions et de valeurs. Il m’a rappelée d’ailleurs “L’écume des jours” du grand Boris Vian. Difficile donc de résumer ce bouquin en quelques lignes, il relève plus d’une expérience de lecture à mon sens, que je vous invite donc à essayer !